Le
calendrier julien
En 46 avant Jésus-Christ, Jules César
décida de reprendre le temps en main. Il fit
venir auprès de lui des astronomes réputés,
dont le Grec Sosigène, et, après une
première année de confusion avec trois
mois intercalaires, il établit un système
de mesure du temps entièrement nouveau : le
calendrier ne tenait plus aucun compte du rythme lunaire,
se basant sur une année solaire de 365,25 jours.
Comme l'année civile devenait trop courte d'un
quart de jour, c'est de César que nous vient
la pratique du jour bissextile, tous les quatre ans,
qu'il institua, lui, le 24 février. Il déplaça
le début de l'année au 1er janvier,
ouverture de l'année politique, et situa les
solstices au 24 juin et au 25 décembre, et
les équinoxes au 25 mars et au 24 septembre.
Le temps allait tourner rond... Or les calculs n'étaient
pas tout à fait justes : Sosigène s'était
trompé d'un jour, et l'année julienne
était plus longue que l'année solaire
de 11 minutes 14 secondes.
Les années et les siècles passant, quand
le concile de Nicée voulut fixer la date de
Pâques, l'équinoxe de printemps ne tombait
plus le 25 mars, mais le 21. Chacun s'interrogea,
les Pères de l'Église s'inquiétèrent,
mais rien ne fut fait avant le pape Grégoire
XIII, en 1577.
Le
calendrier grégorien
Pendant cinq années, une commission de savants
prépara la réforme du calendrier, et,
le 24 février 1582, le pape Grégoire
XIII fit connaître à tous les princes
chrétiens le nouvel ordre du temps. Le calendrier
grégorien fixait définitivement l'équinoxe
de printemps au 21 mars, n'hésitant pas pour
cela à supprimer dix jours à l'année
1582. Les trois jours d'écart dus au calendrier
julien étaient rattrapés en supprimant
le jour bissextile de chaque début de siècle,
1600, 1700, 1800.
Les pays catholiques suivirent plus ou moins rapidement
la bulle papale et son calendrier, les protestants
s'inclinèrent un siècle plus tard. Quant
aux pays de religion orthodoxe, certains ne se rallièrent
à ces dates qu'au cours du 20ème siècle.
Les Eglises russes, serbes et bulgares suivent le
calendrier julien intégralement. Les Eglises
grecques, roumaines suivent le calendrier grégorien
sauf pour le cycle de Pâques. L'Eglise de Finlande
et une partie de l'Eglise d'Estonie suivent intégralement
le calendrier grégorien.
Et
Pâques ?
La date de Pâques est liée aux circonstances
de la Passion du Christ, et d'après les témoignages,
cet épisode se déroula pendant la Pâque
juive, c'est-à-dire autour de 15 nisan. Or
le calendrier juif, lui, est reste totalement lunaire.
Le nombre de mois varie selon les années. "
Mais le principe est simple, explique le rabbin Josy
Eisenberg. L'année lunaire a 354 jours, le
mois lunaire a 29 jours et demi, alors que le mois
solaire en a 30 et demi et l'année civile 365
jours. Il y a un écart de 11 jours. En multipliant
11 par 19, c'est-à-dire à un jour près,
on obtient 7 mois. Donc, en ajoutant 7 mois tous les
19 ans, on rattrape le cycle. Sur 19 ans, à
sept reprises, l'année a 1 mois supplémentaire,
à peu près tous les 3 ans. Le treizième
mois se place avant nisan, c'est pourquoi il peut
y avoir une amplitude de 22 jours entre les dates
de la Pâque. La Pâque peut se célébrer
le 20 aussi bien que le 1er avril. Les années
où la Pâque est fêtée le
20 avril, cela signifie que le mois de mars a été
doublé. L'année suivante, à la
suite du décalage de 11 jours entre l'année
lunaire et l'année solaire, la date de la Pâque
sera le 9 avril, la deuxième année le
27 ou le 28 mars et la troisième le 28 avril.
On repart 30 jours en avant. La Pâque juive
est une fête fixe, avec le décalage des
mois supplémentaires tous les trois ans. Le
calendrier juif est intermédiaire entre le
calendrier chrétien qui a sa logique propre
et le calendrier musulman qui est complètement
lunaire. Le calendrier juif fait que la Pâque
tombe toujours au printemps. "
La Pâque juive est une fête fixe, au rythme
du calendrier lunaire ; les Pâques chrétiennes,
soumises au calendrier solaire, deviennent une fête
mobile, puisque les mesures du temps ne concordent
pas. Comment calculer cette mobilité ? Les
communautés chrétiennes des premiers
siècles célébraient Pâques
à des dates différentes. Les Pères
de l'Eglise reprirent l'étude des Ecritures,
les interprétèrent et se livrèrent
à des calculs complexes.
" Dieu parla à Moïse et à
Aaron, au pays d'Egypte, en disant : " Ce mois
est pour vous le début des mois, c'est pour
vous le premier mois de l'année. " Le
premier mois ne pouvait être que celui où
le jour et la nuit sont d'égale durée,
or, comme il s'agissait du mois d'abib, celui où
mûrit l'épi qui prendra plus tard sous
l'influence du calendrier babylonien le nom de nisan,
on pouvait donc tirer la conclusion qu'il fallait
entendre le mois de l'équinoxe de printemps.
"Au premier mois, au quatorzième jour
au soir", avait intime Dieu. " Les mois
lunaires commençant avec l'apparition de la
Lune, le quatorzième jour correspondait donc
à la pleine lune.
Après trois siècles de conflits, le
concile de Nicée, en 325, fixa définitivement
la date de Pâques à un dimanche, ce qui
n'était pas le cas jusqu'alors et s'écartait
de la Pâque juive, au dimanche qui suivrait
la pleine lune de l'équinoxe de printemps.
Mais comme la lune astronomique pouvait avoir des
irrégularités, on se basa sur une lune
fictive, ou lune ecclésiastique, pour abolir
les écarts de phase lunaire qui pouvaient survenir.
Ces calculs eurent pour conséquence d'entraîner
l'établissement d'un calendrier ecclésiastique
particulier, en partie lunaire et en partie solaire
: solaire du premier dimanche de l'Avent au neuvième
dimanche avant Pâques, avec des fêtes
fixes, comme Noël, puis lunaire pendant l'autre
partie de l'année, avec des fêtes mobiles
dépendant toutes de la détermination
de la date de Pâques. Le premier dimanche après
la pleine lune qui suit l'équinoxe de printemps.
Selon cette règle, la date de Pâques
peut varier entre le 22 mars et le 25 avril. Mais
deux exceptions furent introduites : a) si le calcul
de la pleine lune donne dimanche 19 avril, la date
est changée en 18 avril, et Pâques est
célébré le 19 avril au lieu du
26; b) si le calcul de la pleine lune donne dimanche
18 avril et si d'autres conditions assez complexes
sont réunies, on antidate la pleine lune au
17 avril et Pâques sera fêté le
18 avril au lieu du 25. La raison de ces exceptions
est d'éviter que la fête de Pâques
ne soit célébrée trop longtemps
après l'équinoxe.
Eglise
catholique, Eglise orthodoxe
De nos jours encore, les Eglises catholique et orthodoxe
ne célèbrent pas Pâques à
la même date, l'Eglise orthodoxe ayant conservé
le calendrier julien, alors que l'Eglise romaine a
procédé à une réforme
du calendrier: la réforme grégorienne.
Dans le numéro d'avril 1983 du SOP, Pierre
Sollogoub déplore ce décalage de célébration
de la plus grande fête chrétienne de
l'année : l'anniversaire de la résurrection
du Christ : " La décision du premier concile
cuménique de Nicée, en 325, peut
être reconstituée de la manière
suivante : que tous les chrétiens fêtent
Pâques le même jour, le premier dimanche
après la pleine lune qui suit l'équinoxe
de printemps. La détermination effective de
la date de Pâques a dès lors été
demandée aux astronomes qui ont mis au point
des tables (pascalies) fondées tout naturellement
sur les connaissances et le calendrier de l'époque.
Ces tables découlent du cycle de Méton,
astronome athénien du 5ème siècle
avant Jésus-Christ, qui établit que
dix-neuf années valent deux cent trente-cinq
lunaisons ; après ce laps de temps, les phases
de la Lune doivent donc revenir à la même
date. Ce principe est toujours en vigueur dans l'Eglise
orthodoxe et comporte deux causes d'erreur : la première
est associée au calendrier julien qui, se décalant
d'environ un jour par siècle, n'est plus en
conformité avec les événements
astronomiques qu'il veut repérer ; la date
censée marquer l'équinoxe du printemps
est décalée actuellement de treize jours.
La deuxième est liée à l'inexactitude
du cycle de Méton lui-même: on peut dire
que la date de la pleine lune indiquée actuellement
dans les pascalies est en retard de quatre à
cinq jours sur la date réelle.
A nous qui vivons en Europe occidentale et qui de
ce fait ressentons peut-être plus particulièrement
la non célébration commune de Pâques,
il nous appartient d'uvrer activement, afin
que l'Eglise orthodoxe puisse à terme fêter
Pâques avec tous les chrétiens. "