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DE L'EUCHARISTIE par Mgr STEPHANOS
Métropolite de Tallinn et de toute l'Estonie
L'HOMME
LIEU THEOLOGIQUE PAR EXCELLENCE
"
Dans mon Royaume, dit le Christ dans le canon des matines
orthodoxes du Jeudi saint, je serai Dieu et vous serez
Dieu avec moi " (4e Ode du 3e Tropaire). Car l'homme
est à l'image de Dieu ; il est appelé
à une ressemblance qui est une participation
réelle à la vie divine. L'homme n'est
vraiment homme qu'en Dieu. L'homme n'est vraiment homme
que déifié, puisque " Dieu est devenu
homme pour que l'homme devienne Dieu en lui " (saint
Athanase), puisque l'homme est un animal appelé
à devenir Dieu. L'exigence de s'unir à
la source de vie qui fait notre être même
ne peut être qu'un événement à
l'intérieur de l'Esprit, l'avènement de
l'Esprit en l'homme est toujours théomorphique
: Dieu l'a créé à son image. Tout
vient de Dieu. L'expérience de Dieu vient aussi
de Dieu, car Dieu est plus intime à l'homme que
lui-même.
Dès lors, chercher Dieu par-dessus tout, c'est
amorcer par l'acte de foi un dialogue liturgique générateur
d'unité à l'image du Christ, dans lequel
ont convergé une fois pour toutes l'expérience
de l'homme par Dieu et celle de Dieu par l'homme. Par
essence donc, l'homme est un être liturgique.
S'il participe à la vie divine, sa communion
se fait à travers une vaste célébration
liturgique qui englobe tout le cosmos. Si cette ouverture
sur tout ce qui est créé n'existait pas,
il n'y aurait pas d'amour possible auquel l'homme prît
part concrètement par l'acte liturgique principal,
c'est-à-dire la prière, ce centre duquel
toute autre action puise sa force et est rendue valide.
C'est à cause de cela que le mystère de
la personne humaine devient lieu théologique
par excellence, en ce sens que créé à
l'image de Dieu, il ne peut se comprendre qu'à
la lumière du dogme trinitaire.
Le dogme de la Trinité, cur de la théologie
orthodoxe, devient, de ce fait, la clé de l'anthropologie
où l'Ecriture, qui ne perd rien de sa dimension
de l'histoire, reçoit un sens eucharistique.
C'est parce que le fait divin, c'est-à-dire la
Parole, fait irruption dans sa propre existence que
l'homme devient " être liturgique ".
Dès lors, l'Evangile ne se limite pas à
définir les rapports qui régissent les
liens entre le Sauveur et le monde ; il nous fait pénétrer
au centre même d'une autre dimension, une relation
de divino-humanité qui est aussi relation filiale
entre le Père céleste et son Fils unique,
l'Esprit Saint étant pour sa part le souffle
qui porte les mots et qui ne se laisse saisir et sentir
que conjointement avec le Christ.
La divino-humanité s'ouvre au cur de l'histoire
par l'Incarnation du Verbe. Alors, puisque Dieu est
devenu, dans le Christ, visage, l'homme à son
tour découvre son propre visage, sa propre vocation
que l'on pourrait appeler " déiforme "
; vocation qui s'inscrit inséparablement dans
le caractère irréductible de sa personne
et dans le dynamisme de son être, de sa nature
vraie. Et la nature vraie de l'homme, qu'il est tragiquement
libre d'exprimer ou de réprimer, est précisément
un dynamisme de célébration, un dynamisme
de participation, une transparence à la lumière
divine qui la fonde et qui l'aimante. Le Christ Sauveur
ayant récapitulé la totalité de
l'humanité et de l'univers par le sacrifice de
la Croix, l'homme trouve sa dimension du " kath'olon
" (catholique) puisque Jésus représente
en archétype ce que nous sommes et cette dimension,
l'homme la trouve dans l'Eglise, dont la profondeur
n'est rien d'autre que cette puissance de résurrection.
L'Eglise en général, nous pouvons la définir
comme " cette vie de Dieu dans les hommes "
pour reprendre ici l'excellente définition de
Khomiakov. Vie qui nous fait connaître Dieu comme
communion des trois Personnes : et c'est la raison pour
laquelle l'Eglise orthodoxe, Eglise absolue de la Sainte-Trinité,
sera ressentie surtout comme communauté eucharistique,
agapé - où la vie s'exprime dans une expérience
réelle de service et de fraternité, où
l'acte de foi et l'acte de glorification se trouvent
indissolublement liés, où la spiritualité
est normalement celle du martyr qui par son identification
au Crucifié éprouve dans une indicible
métamorphose la plénitude de la Résurrection.
Ainsi par l'extension de l'Incarnation, où le
Christ Dieu-Homme passe au Christ Dieu-Humanité,
l'Eglise est devenue un seul Corps, dans lequel les
hommes sont membres les uns des autres, bien plus, consubstantiels.
Quant à l'Eucharistie, elle manifeste notre entrée
dans cette divino-humanité puisqu'elle nous donne
de communier au Christ ressuscité. Elle est donc
une entrée dans la Jérusalem céleste.
Tel est le " réalisme spirituel " qui
découle de la Résurrection : notre être
déifié dans le Christ, n'est pas une idéologie
mais une réalité, animée par le
Souffle de Dieu. " Faire eucharistie de toutes
choses " c'est alors porter témoignage au
Christ ressuscité, c'est rendre l'Eglise présente
au cur du monde. " L'homme, disait le patriarche
Athénagoras, porte en lui un dramatique univers
intérieur. Qu'il trouve donc dans l'Eglise son
lieu véritable, près de Dieu. Qu'il apprenne
à réaliser avec Dieu une synergie, une
ascèse créatrice capable de susciter une
authentique culture, de maîtriser la vie en la
spiritualisant [...] L'homme a besoin, plus que n'importe
qui d'autre, de l'Eglise et de la Liturgie [...] Il
a besoin de faire l'expérience de la présence
du Christ en lui, et de sortir du sanctuaire porteur
du témoignage du Christ [...] il a besoin d'être
possédé par un désir constant de
transfiguration, en aspirant à un monde renouvelé...
"
C'est pourquoi la théologie orthodoxe sera avant
tout une théologie de célébration
où l'homme devient le prêtre du monde,
le grand célébrant de l'existence ; où
la pensée s'éclaire dans le mystère
puisque, par l'effusion du Saint-Esprit, nous devenons
oints du même Esprit qui a ressuscité Jésus.
C'est donc pour cette raison que l'ecclésiologie
orthodoxe sera une ecclésiologie de communion
qui aura pour cur l'Eucharistie. L'orthodoxie
en effet a une vision précise de la relation
directe entre l'action sacramentelle et l'Eglise, entre
Eucharistie et Eglise. Elle reprend, là la conception
patristique qui voit dans l'Eucharistie le sacrement
de l'unité de l'Eglise, c'est-à-dire la
manière dont se réalise l'Eglise dans
l'Eucharistie : à savoir que la communion au
sacrement de l'Eucharistie signifie précisément
la communion dans l'Eglise une. Cette unité n'est
pas morale mais ontologique : l'unité ecclésiale
et la plénitude de la foi sont des impératifs,
des exigences que l'on n'est pas en droit de mettre
entre parenthèses, même provisoirement.
L'EUCHARISTIE,
SACREMENT DES SACREMENTS
Le
texte grec des Actes des Apôtres (2, 47) nous
définit de façon très précise
la première communauté chrétienne
de Jérusalem en affirmant que le " Seigneur
ajoutait chaque jour " epi to afto ", ceux
qui étaient sauvés ". Or, le sceau
de cette communauté était la fraction
du Pain et la bénédiction du Vin dans
un contexte essentiellement liturgique, charismatique,
eucharistique. Aussi nous comprenons que " epi
to afto " doit se traduire par " Eucharistie
". Si par ailleurs nous nous référons
à l'apôtre Paul (1 Co 10, 17) : "
puisqu'il n'y a qu'un pain, à nous tous nous
ne formons qu'un Corps, car tous nous avons part à
ce Pain unique), nous constatons avec certitude que
ce terme de Corps, suggéré par l'expérience
eucharistique, manifeste l'Eucharistie ainsi que nous
l'avons déjà expliqué plus haut
; un acte avant tout de la communauté ecclésiale,
fête de la plénitude et de l'unité
de l'Eglise dans l'ordre du signe efficace à
cause de la foi qu'elle porte : le Christ tout entier
et nous tout entiers, chacun et tous ensemble, corps
et âme.
L'Eucharistie est donc le sacrement des sacrements,
celui par excellence de l'Assemblée, tout d'abord
l'uvre de l'Eglise et non de groupes isolés.
Dès lors, on se posera toujours hors de l'Eglise
en se posant hors de la communion eucharistique, puisque
l'Eucharistie est la plénitude de vie en Jésus-Christ
et dans l'Eglise, à la fois condition et expression
de l'Eglise. L'Eucharistie se définit donc comme
ce lieu par excellence privilégié où
l'homme liturgique déchiffre l'existence tout
entière dans la " Lumière de la vie
", là où il s'éveille à
cette Présence qui transforme le monde "
en buisson ardent ", là enfin " où
ce monde à venir " devient l'intérieur
de la Parole biblique.
Il est significatif que l'Eglise orthodoxe n'a pas été
empêchée de vivre la collégialité
et de dispenser la Parole de Vérité, malgré
le fait que depuis neuf siècles, elle n'a plus
réuni de concile ayant formellement le statut
de concile cuménique. Cela est compréhensible
dès lors que l'on redécouvre l'Eucharistie
non pas dans une conception individualiste, mais à
la fois comme le sacrement où l'Eglise est l'Eglise,
où elle se révèle comme sacrement
et où toute sa réalité est englobée.
Forte de cette conviction, l'Eglise orthodoxe n'a pas
été tentée de voir en un organisme
particulier, " la plus haute autorité ",
car elle sait que la plus haute autorité, c'est
bien l'Eglise dans sa signification totale et dans sa
plénitude, profondément unie dans le Christ
ressuscité par la puissance et la force du Saint-Esprit,
qui change universellement ce qu'il touche.
En accord avec cette doctrine, le prêtre orthodoxe,
lorsqu'il célèbre la divine Liturgie,
ne s'identifie pas au Christ, il ne prononce pas les
paroles " Ceci est mon corps " in persona
Christi, mais il s'identifie à l'Eglise et parle
in persona ecclesiae et in nomine Christi, de sorte
que les paroles du Christ, mémorisées
par le prêtre, acquièrent l'efficacité
divine par l'invocation du Saint-Esprit dans l'épiclèse.
Après quoi, une fois les dons changés,
l'Esprit-Saint opère le changement des communiants
eux-mêmes : en consommant la chair du Fiancé
et son Sang, ils entrent dans la " koinonia "
nuptiale et deviennent à leur tour des hommes
eucharistiques.
" Notre doctrine, explique saint Irénée
de Lyon, est en accord avec l'eucharistie et l'eucharistie
la confirme [...] on ne peut aller plus loin ni rien
ajouter. " L'Eucharistie constitue donc le cur
de l'Eglise, l'orthodoxie ayant de ce fait une vision
précise de la relation directe entre l'action
sacramentelle et l'Eglise, entre Eucharistie et Eglise.
La déclaration particulière des orthodoxes
à l'Assemblée du Conseil oecuménique
des Eglises, à Evanston en 1954, stipule que
" seule l'unité et le lien des chrétiens
dans une foi commune peut conduire, comme à une
conséquence nécessaire, à leur
communion sacramentelle et à leur unité
indissoluble dans l'amour comme membres de l'unique
et même Corps de l'unique Eglise du Christ ".
L'Eglise devient de la sorte condition de l'Eucharistie
et l'Unité dans l'Eglise, condition de la communion
eucharistique.
Dans un certain sens, l'Eglise se contrôle en
contrôlant son comportement vis-à-vis de
l'Eucharistie, puisque l'Eucharistie n'est pas la praxis
(l'acte) d'un chacun, mais de toute l'Eglise. Cette
Eglise est fondée à la fois sur l'Eucharistie
et la Pentecôte, en d'autres termes sur la réciprocité
et le mutuel service du Fils et de l'Esprit ; de sorte
que " l'effet et le résultat des actes du
Christ, ce n'est rien d'autre que la descente du Saint-Esprit
sur l'Eglise " (N. Cabasilas). Pour cette raison,
dans l'Eglise orthodoxe, la grande initiation des fidèles
(baptême-confirmation-eucharistie) et l'ordination
des prêtres sont liées par une étroite
parenté liturgique car tous sont consacrés
par Dieu pour les choses de Dieu et selon Hippolyte
de Rome, le baptisé reçoit le baiser de
paix (analogue au baiser de l'ordination épiscopale)
comme celui qui est digne de son nouvel état
: " dignus effectus est. " Le sacrement de
l'onction chrismale (confirmation) fait donc de tous
les baptisés un peuple sacerdotal en Dieu, duquel
quelques-uns sont élus, retirés et établis
par l'acte divin : évêques (c'est-à-dire
avant tout, témoins apostoliques de l'Eucharistie)
et presbytres.
Plutôt que de se lancer dans des discussions sur
le " Corps du Christ " ou le " Peuple
de Dieu ", l'Eglise orthodoxe préfère
insister sur l'homogénéité absolue
existant entre les membres de la communauté ecclésiale,
où la hiérarchie se trouve intégrée
de l'intérieur sans se situer au-dessus de la
communauté collégialement rassemblée
autour du Christ par la Grâce du Saint-Esprit.
A cause de cela, la spiritualité orthodoxe n'est
jamais différenciée en " spiritualité
des laïcs " d'une part et " spiritualité
des évêques, des clercs en général
ou des moines ", d'autre part. C'est un don du
Saint-Esprit qui souffle où Il veut. Le Corps
du Christ est ainsi maintenu sans séparation
; la Grâce de Dieu et la spiritualité de
l'Eglise sont homogènes. Personne n'en dispose
pour lui seul, d'une façon privilégiée,
et personne n'a la faculté de devenir plus spirituel
ou plus missionnaire. " Tous les membres de la
société divine, qu'ils soient évêques
ou catéchumènes, bénéficient
de la double fonction d'être illuminés
et d'illuminer, d'être purifiés et de purifier,
de participer et de rendre les autres participants.
Pour cette raison, la diaconie liturgique des évêques
n'est possible qu'avec et dans la communauté
eucharistique autour de la table du Seigneur, par la
puissance du Saint-Esprit qui réside également
en tous les membres qui constituent le " Peuple
de Dieu ".
L'Eglise orthodoxe connaît ainsi la différence
fonctionnelle des ministères (ce qui a pour conséquence
de ne pas couper l'unique Corps en deux) et la participation
sacerdotale de tous à l'unique prêtre divin,
le Christ, au moyen des deux sacerdoces : le sacerdoce
universel des fidèles et le sacerdoce d'ordre
du clergé. Chacun est établi par Dieu
et comporte son propre sacrement et ses propres charismes.
Ainsi l'évêque participe au sacerdoce du
Christ par sa fonction sacrée. Le Corps du Christ
étant Un, en effet, il faut que cette unité
soit dégagée. Telle sera la vocation de
l'épiscopat : un ministère, un service
de l'Unité de l'Ecclesia, puisque l'Eglise est
avant tout mystère d'amour à l'image de
l'amour conjugal entre le pasteur, image de Dieu le
Père (Source de toute unité) et la congrégation.
C'est pourquoi l'évêque, lié de
ce fait à la communauté ecclésiale
qu'il préside, tiendra son pouvoir sacramentel,
doctrinal et pastoral en raison de la place qu'il occupe
dans l'assemblée eucharistique. Et de même
aussi, tout laïc le fait par son être même
car il participe à l'unique sacerdoce du Christ
(le seul qui à la fois " offre et est offert
") par son être sanctifié, par sa
nature sacerdotale. C'est en vue de cette dignité
d'être prêtre dans sa nature même
(son être liturgique) que tout baptisé
est scellé des dons, oint de l'Esprit Saint dans
son essence même et qu'il offre en sacrifice,
en " hostie vivante " (Rm 12, 1) la totalité
de son être, son témoignage pouvant aller
jusqu'au sacrifice de sa vie (Mt 10, 17-42).
Armé ainsi pour le combat par l'Esprit-Saint,
le laïc sera donc scellé des dons spirituels
dans tout son être, avons-nous déjà
dit, c'est-à-dire qu'il est un être entièrement
charismatique au service de Dieu en tout acte et en
toute parole. De même, par la confirmation, il
est appelé à participer aux trois pouvoirs
: le gouvernement (e. a. consensus ecclesiae ; "
amen " ; épiclèse au pluriel : Nous
T'offrons...), l'enseignement (e. a. missions; prédication,
catéchèse...) et la sanctification (e.
a. staretz...). Les laïcs ne peuvent pas accorder
les moyens de grâce (sacrements) ; par contre
leur sphère est la vie de grâce, de telle
sorte que le sacerdoce universel détient le pouvoir
du sacre cosmique, de la liturgie cosmique, puisque
dans leur vie les laïcs continuent la liturgie
de l'Eglise : par leur présence active, ils introduisent
la Vérité des dogmes vécus dans
le social et dans les rapports humains et ils délogent
ainsi les éléments démoniaques
et profanés du monde. C'est pourquoi saint Paul,
dans l'épître aux Romains (12) nous exhorte
tous sans distinction au culte raisonnable : faire de
notre vie une liturgie, une doxologie, une eucharistie.
L'EGLISE
LITURGIQUE
Cette
présence du mystère du Christ dans la
communion du Saint-Esprit, les orthodoxes l'expérimentent
dans leur liturgie eucharistique, qui reste pour eux
une invitation permanente à la " création
dans la fidélité " grâce à
cette communion à l'Esprit Créateur qui
nous permet de découvrir l'Image radieuse du
Père, c'est-à-dire, dans son Eglise, le
Fils incarné.
L'expérience eucharistique, le mystère
redoutable, est une communion bien réelle, physique
et spirituelle à la fois qui embrasse tout l'être
mais n'a rien de magique, d'extérieur ou de mécanique.
Au contraire, on peut dire que les deux éléments
fondamentaux et essentiels de l'expérience de
l'Eglise chrétienne (c'est-à-dire la commémoration
de la Passion et la gloire débordante du Ressuscité)
s'unissent dans l'Eucharistie. Le culte devient ainsi
le lieu privilégié non seulement de la
foi, mais de tout l'épanouissement de l'homme
; c'est parce que le culte reste eschatologique que
l'homme se découvre d'autant plus libre qu'il
connaît le contenu de la liberté qui est
la Vérité.
Chez l'homme liturgique, l'option de la foi s'articule
immédiatement à sa réalité
propre. L'Eglise orthodoxe, forgeant l'homme de prière,
a historiquement donné au monde le meilleur d'elle-même,
car c'est là qu'elle s'est exprimée librement,
dans le génie de l'Esprit-Saint.
L'Eglise orthodoxe est et restera toujours une Eglise
par excellence liturgique; une doxologie qui traduit
une vision eucharistique permanente du monde, l'univers
tout entier étant compris , comme une liturgie.
Dans cette doxologie, l'Ecriture constamment présente
(et qui, redisons-le encore une fois, ne perd rien de
sa dimension historique) reçoit un sens eucharistique.
Le langage chrétien est donc essentiellement
un langage biblique. . Il exprime une démarche
authentique et totale de foi constante,,, éveillée,
éclairée et nourrie.
A travers cette démarche exprimée dans
ce langage, il y a un véritable transfert d'énergie
déificatrice en l'homme, qui lui procure une
conscience adulte et prophétique. Ainsi, c'est
bien l'Ecriture sainte célébrée
dans la liturgie de l'Eucharistie qui assure la continuité
de l'Eglise. (In " une saison en orthodoxie " Ed Cerf
Paris 1992 p :235-244)