La Fête que nous commémorons ce matin
porte le nom liturgique de « Dormition » de la Mère
de Dieu. Ses origines sont assez obscures. Elle était,
en Palestine, célébrée le 15 août dès avant l’an 500.
Les Egyptiens la célébraient aussi, mais le 18 janvier.
L’observance du 18 janvier passa d’Egypte en Gaule au
IVe siècle. Parmi les Grecs, les uns suivaient l’usage
palestinien, les autres l’usage égyptien. Au VIIe siècle,
l’empereur byzantin Maurice fixa définitivement la fête
au 15 août. Quant à la dormition de la bienheureuse
Vierge Marie, nous ne savons ni où ni quand Elle mourut.
Il existait à cet égard deux traditions dans l’antiquité
: d’après l’une, Marie se serait endormie à Jérusalem
; d’après l’autre, à Ephèse.
C’est dans les chants des vêpres et
des matines qu’il faut chercher la signification particulière
que notre Eglise attribue à la fête du 15 août.
Cette signification est double. Elle
se trouve exactement exprimée dans cette phrase chantée
aux vêpres : « La source de vie est mise au sépulcre
et son tombeau devient l’échelle du ciel ». La première
partie de la phrase – « la source de vie est mise au
sépulcre » - indique que nous commémorons la mort de
la très sainte Mère de Dieu. La deuxième partie de la
phrase dit : »… et son tombeau devient l’échelle du
ciel ». La tombe de quiconque est mort dans le Christ
est, d’une certaine manière, une échelle qui conduit
au ciel.
Cependant le cas de Marie est exceptionnel.
Les textes liturgiques que nous chantons impliquent
autre chose ; « Ouvrez larges vos portes…et accueillez
la Mère de la lumière intarissable…Car, en ce jour,
le ciel ouvre son sein pour la recevoir…Que tout fils
de la terre tressaille en esprit…et célèbre dans la
joie la vénérable Assomption de la Mère de Dieu ». On
le voit, il ne s’agit pas seulement de la réception
de l’âme de Marie dans le ciel. Nos textes hymnographiques
expriment la croyance en l’assomption corporelle de
Marie.
Quoique
l’assomption de Marie n’ait fait l’objet d’aucune définition
dogmatique par l’Eglise Orthodoxe, notre liturgie du
15 août évoque bien d’une part la mort naturelle de
la Mère de Dieu, sur laquelle elle ne laisse planer
aucun doute et d’autre part elle laisse entendre que
Marie, après sa mort, a été mystérieusement glorifiée
dans son corps. Autrement dit : Marie jouit de la Vie
éternelle sans être soumise au Jugement ( Jean 5,24
) car la Mère de la Vie n’a pu rester dans la corruption
et pour cette raison,le tombeau et la mort furent impuissants
à La retenir. D'ailleurs comment nier un fait qui n'est
susceptible d'aucune vérification historique? La conscience
orthodoxe, éclairée par le Saint-Esprit, s'est peu à
peu persuadée que, « si le salaire du péché, c'est la
mort » ( Romains 6,23 ), Marie a remporté sur la mort
une victoire spéciale. Son corps incorruptible n'est
pas soumis à la résurrection mais il transite directement
de la terre vers le ciel pour y rejoindre son âme et
s'unir à elle.
Voyons comment les Pères de l'Eglise, et plus spécialement
Saint Jean Damascène, comprennent cela : la
Sainte Vierge s'est véritablement endormie et a été
enterrée. Comme tous les enfants d'Adam et d'Eve, Elle
n'a pas été dispensée du péché originel. Et il lui fallut
aussi payer le tribut qui échoit à tout être venant
au monde, le tribut de la mort. Mais en même temps,
la chair de Jésus, véritablement Dieu et Homme, était
entièrement et seulement la chair de Marie. Or la chair
de Jésus était par nature sans péché et donc aussi,
par grâce, celui de sa Mère, la Sainte Vierge. La mort
n'a pas pu donc retenir la Mère de Dieu. Pour cette
raison,dans le tombeau, son corps corruptible a revêtu
l'incorruptibilité et son corps mortel a revêtu l'immortalité
et c'est ainsi que s'est accomplie la parole : la mort
a été engloutie dans la victoire ( 1 Cor.15,53-54 ).
Chers Frères et Soeurs en Christ,
La Fête de la Dormition nous délivre
deux messages forts :
Le premier.Tous nous sommes assujettis
à la mort. N'ayons pas peur. Pour le chrétien, la mort
a cessé d'être la mort. Elle est une dormition. Ne pleurez
pas les morts qui ont vécu selon les commandements de
Dieu. Ils dorment corporellement. Leur âme vit déjà
au ciel, en attendant que leur corps vienne un jour
lui aussi les rejoindre. Seul Christ est à même de solutionner
pour nous ce problème que personne ne peut résoudre
en dehors de Lui : le problème de la mort.
Le second. La Mère de Dieu ne cesse
de se tenir à nos côtés et d'intervenir pour nous auprès
de Dieu. Tournons-nous sans cesse vers elle. Qu'elle
intercède inlassablement pour chacun d'entre nous, pour
nos foyers, pour notre jeunesse, pour ceux qui sont
dans la vieillesse, pour les malades, pour les prisonniers,
pour tous ceux qui peinent et qui souffrent de tous
maux connus ou inconnus de nous.
Très Sainte Mère de Dieu, assiste-nous,
réconforte-nous et protège-nous. Amen !
-
- - - - - - - - - - - -
( d'après „Un Moine de l'Eglise d'Orient : L'AN DE GRâCE
du SEIGNEUR“, Ed.AN NOUR , 1972, Tome2, pp.157-159 et
„Archim.Daniel G.Aeraki : KLIMATA TIS AMPELOU“, Athènes
1989, pp.530-536 )