CHRISTIANISME
ET CINEMA
Par
le Métropolite Stephanos de Tallinn
1.
PROMESSES
Notre
civilisation est de plus en plus une civilisation de
l'audiovisuel où le cinéma joue le rôle de «tête-chercheuse».
Pour une large part sa concurrente, la télévision, ne
fait que le répercuter. Il s'agit d'un art total, qui
est aussi un art pour tous, ce que furent, dans les
civilisations traditionnelles, la danse et surtout la
liturgie. En ce qui concerne cette dernière, disons
toutefois qu'il existe une tendance parmi les chrétiens
contemporains à séparer la spiritualité, c'est-à-dire
la vie de prière et de piété, des autres dimensions
de la foi. Or la «vision de la foi» peut être comparée
à un système fluvial, qui forme un ensemble, un tout
où chaque dimension appuie et nourrit les autres. Aucun
aspect n'est autonome et un changement qui s'effectue
dans un secteur peut modifier tous les autres. En utilisant
le terme «vision de foi», nous pensons à des représentations
visuelles où les divers éléments ( couleur, forme, perspective,
lumière, ombre, etc... ) s'entremêlent pour former un
ensemble. C'est le tout qui retient l'attention et non
pas les éléments isolés. En parlant de «vision de foi»,
il convient ici de mettre l'accent sur le contenu de
cette structure : la foi chrétienne est une vision du
monde et elle organise l'existence humaine, en établissant
des relations entre Dieu et l'être humain, entre toutes
les personnes humaines et entre l'homme et la création.
Si la plupart du temps cette réalité n'est plus perçue
par les chrétiens contemporains, c'est parce qu'elle
résulte d'un émiettement de l'expérience chrétienne
en rupture de communion avec le passé et entraînant
une rupture entre les différentes dimensions de la foi
unique. La spiritualité est donc réduite à sa dimension
sentimentale, personnelle. Le cinéma quant à lui, un
art de la technique la plus poussée, qui permet d'unir
non seulement la vue et l'ouïe mais le temps et l'espace.
C'est le cinéma qui a dynamisé l'espace en recréant
pour lui une temporalité. Le cinéma donc suscite (peut
susciter) une sorte de communion affective, chaude,
en-deçà ou au-delà du langage, quand elle touche les
entrailles ou le cœur - mais rarement la tête, la rationalité
discursive. D'où les expressions : «vibrer» , «être
in», «être branché». Le cinéma apparaît ainsi comme
la liturgie d'une culture ouverte, planétaire, réellement
uniformisante d'ailleurs car chaque nation, chaque culture
locale et sa mémoire propre peuvent s'y exprimer tout
en s'universalisant, tout en devenant directement sensible
aux entrailles et parfois aux cœurs de dizaines et de
milliers de spectateurs, partout dans le monde comme
c'est, par exemple, le cas pour les «jidaï-geki» ( films
historiques ) de Kurosawa ou le film de Tarkovski sur
Roublev ... Un festival de cinéma comme celui de Cannes
peut par conséquent relever, en mode sécularisé bien
entendu, de la Pentecôte plus que de Babel ! Par le
fait qu'il exprime à sa manière le retour des êtres
et des choses, le cinéma est à même de nous transmettre
une vraie poétique du sensible. Son développement a
coïncidé avec celui de l'abstraction picturale. Les
êtres et les choses, qui avaient régné dans la grande
peinture à l'huile occidentale, ont presque disparu
de la peinture du 20ème siècle au profit d'une exploration
de la subjectivité ou d'une mise en œuvre de la dérision.
Le cinéma, parfois naïvement, parfois avec une vigueur
extrême, nous a rendu, dans une sorte d'éveil élémentaire,
le choc des êtres et des choses. Avant tout des visages
: la face humaine, le gros plan, comme langage muet,
regard, silence, appel. Chez Dreyer, notamment dans
sa «Jeanne d'Arc», la suppression du maquillage a donné
aux visages une force étrange, terrible, qui accuse
singulièrement le feu intérieur de ses sentiments. Choc
des visages, choc aussi des choses, soudain révélées.
Delluc a pu dire d'un très ancien film, «Les Proscrits»,
de Victor Sjöström (1917) que «l'interprète le plus
éloquent» de ce film, «le plus beau du monde» est le
paysage. Pourtant l'Eglise, même si de nos jours elle
devient un simple phénomène de mode et ainsi le cœur
de son message échappe souvent à ceux de l'extérieur,
a toujours reconnu un lien étroit entre les formes visuelles
(comme par exemple l'iconographie) et verbale de l'Evangile,
c'est-à-dire la parole et l'image. Ces deux dernières,
que l'on retrouve intimement unies dans la liturgie
orthodoxe, ne sont que des expressions différentes du
même contenu : l'expression verbale nous fait comprendre
plus facilement l'expression visuelle et vice-versa.
Cette brève remarque nous permet de mieux éclairer,
ce me semble, notre propos sur le cinéma : art de la
technique la plus poussée, qui permet d'unir non seulement
la vue et l'ouïe, mais le temps et l'espace, c'est lui
qui a dynamisé l'espace en recréant pour lui une temporalité.
«Le cinématographe, a dit Breton, est une écriture avec
des images en mouvement de lignes et de volumes en mouvement
et des sons», et le même d'ajouter : «Vois ton film
: une combinaison de lignes et de volumes en mouvement»
! On peut donc considérer déjà à ce stade de notre pensée
que le cinéma exprime une sorte de métalangage planétaire.
Au cœur de la tradition spirituelle de l'Orient chrétien
se trouve le thème philocalique, c'est-à-dire l'amour
de la beauté. La beauté, selon notre spiritualité, ne
peut être prise bien entendu dans un sens purement esthétique
; elle est nécessairement inséparable de la sainteté
: celle de Dieu et celle de l'homme, son image ; celle
de l'être créé dans sa transparence. Elle est donc proprement
révélation ; elle naît de cette tension entre l'ordre
du Logos ( le Verbe de Dieu ) et le dynamisme du Pneuma
( Souffle, Esprit ), ce que les Grecs avaient déjà entrevu
lorsqu'ils distinguaient l'équilibre apollinien et le
mouvement dionysiaque. Le monde n'est pas destiné, dans
la théologie de l'Eglise orthodoxe, à se résorber en
Dieu mais à devenir «le lieu de Dieu», comme dit l'ascèse
hésychaste du cœur de l'homme, fine pointe de la création.
L'homme désire la beauté par l'impulsion la plus profonde
de sa nature car il porte en lui, disent les Pères de
l'Eglise, «un logos, autrement dit une parole poétique
cachée» . Pour Berdiaev, «la beauté est la caractéristique
de l'état qualitatif suprême du fait d'être la réalisation
suprême de l'existence et non un côté isolé de l'existence
... La beauté n'est pas essentiellement une catégorie
esthétique mais essentiellement métaphysique» ( in Dialectique
existentielle, p.10). Aussi la soif de beauté n'est
nullement le seul privilège des artistes, elle est ontologique
et personnelle ; chacun est appelé à manifester dans
le quotidien de sa vie quelque chose de la Beauté divine.
J'ajouterai encore que la véritable beauté, celle «qui
produit toute communion», fait entrer l'homme dans une
authentique «connaissance-inconnaissance» où il s'unifie
et se dépasse dans la lumière . Et pour le chrétien,
la Lumière, c'est le Christ . Et c'est aux artistes
qu'il appartient nécessairement de prolonger sa célébration
dans le quotidien de l'existence. Serait-il audacieux
de dire ici que d'une certaine façon, nous sommes appelés,
le poétique guidant le politique, à créer, dans le respect
de la terre et des visages une civilisation de la Beauté
? Et pourquoi le cinéma n'en serait-il pas de ceux-là,
à l'image de Renoir chez qui s'épanouit le bonheur comme
accord de l'homme et de la lumière du monde, ou de ces
Russes qui savent si bien nous montrer la liturgie du
fleuve et de la forêt, ou des Japonais qui arrivent
à fonder l'homme dans la splendeur cosmique ainsi que
nous le constatons dans le " Dersu-Uzala " de Kurosawa
? Et puis, à la rencontre de l'humain et du cosmique
triomphe le visage de la femme. Plus connus que ceux
des acteurs sont les visages des grandes actrices :
sensualité virginale de l'étoile, de la star. Sans doute
parce qu'à la force plus grande de l'homme, la femme
a de tous temps opposé sa ténacité biologique et que
sexuellement, l'homme a partie liée avec l'instant et
la femme avec la durée. Servante, mais qui enfante et
infantilise le mâle ; servante de l'espèce en définitive,
et l'homme est toujours tenté de se dissoudre au sein
de la grande mère cosmique. Dans l'unique roman de Pierre
Emmanuel, qu'il a écrit deux fois, «Car enfin je vous
aime», chaque femme semble représenter une dimension
du Soi de l'homme, un Soi qui finalement n'est qu'un
moi ivre de division et de solitude, fasciné par le
suicide comme une étrange voie d'unification ... Alors
comment ne pas oser écrire que le cinéma est d'une certaine
manière porteur de sophiologie, en ce sens qu'il est
capable, malgré les ambiguïtés qui lui sont propres,
d'exprimer une opinion à caractère théologique susceptible
d'être débattue et comment ne pas mentionner ici ce
prophète qu'est Theilhard et son fameux «l'Etemel Féminin»
? Ou même le tout récent film de Terrence Malick «La
ligne rouge».
2.
PROBLEMES
Notre
civilisation n'est ni matérialiste, ni spirituelle,
elle est psychique. Nous sommes tous, pour paraphraser
une expression de Godard qui préférait évoquer Marx
(depuis celui-ci s'est révélé bien mort) , «les enfants
de Freud et de Coca-Cola». Le cinéma est le miroir grossissant
de cet aspect majeur de la culture contemporaine. C'est
un art de l'imaginaire qui nous plonge passivement (nous
sommes en effet spectateurs, non acteurs), dans l'océan
sans rêves ni repères de l'immanence psychique. C'est
un art onirique, images surgissant comme des rêves dans
la «salle noire» de l'âme abandonnée et sans défense.
Le cinéma peut éveiller au «réel au-delà du réel». Il
peut aussi maintenir dans une sorte de somnambulisme
: quand nous échappons aux machines à produire diurnes,
nous sommes saisis, «possédés» par les machines à rêver
nocturnes. Ainsi, très souvent le cinéma dé-réalise.
Il remplace la réalité «rugueuse à étreindre» et la
vision qui veut la longue et patiente ascèse par une
irréalité où l'on peut tout voir sans rien vivre. Il
constitue de ce point de vue la clé de voûte de ce que
les " situationnistes " nommaient la société du spectacle.
Dans l'océan du psychique, la soif de succès, d'argent,
et aussi l'universalité réduite à l'élémentaire entraînent
la montée des puisions contenues dans les civilisations
traditionnelles par tout un jeu d'interdits et de rites.
La civilisation planétaire dont le cinéma est la liturgie
met en cause aussi bien l'interdit premier de l'inceste
que le «Tu ne tueras pas» biblique (ou, ailleurs, la
ritualisation sacrificielle de la mort). Dans cette
banalisation du sexe et de la mort (mais que reste-t-il,
quand il n'y a plus aucun repère, sinon le sexe et la
mort ?), la relation du cinéma et de la société est
une causalité circulaire, l'argent servant de courroie
de transmission. Ainsi se déchaînent «les monstres obsessionnels
du carnage et de la fornication», écrit Pierre Emmanuel
; drogues pour maniaques du libertinage ou pour révoltés
d'un monde absurde, cerné par le néant. Or, Freud vieillissant
et cancéreux l'avait redécouvert, Thanatos (la Mort)
est inséparable d'Eros. Dans la victoire du nihilisme,
il ne s'agit plus d'une simple réduction au sexe et
à la violence, mais d'un enchaînement inéluctable :
notre société diurne confesse la morale de Kant ; notre
société nocturne, cinématographique, rêve I'anti-morale
de Sade. Devant le succès de «Un chien andalou» ( 1928),
Bunuel notait : «La foule imbécile a trouvé beau ou
poétique ce qui au fond n'est qu'un désespéré, un passionné
appel au meurtre". Cela ne peut laisser un chrétien
indifférent. Il lui faudra donc réfléchir sur la présence
de l'Eglise dans la culture et la société. La société
sécularisée marque la fin du cléricalisme mais peut
devenir pour l'Eglise le lieu d'un rayonnement désintéressé,
à la fois périlleux et fécond. Que les chrétiens, renonçant
au pouvoir et à la violence, deviennent les serviteurs
pauvres et pacifiques du Dieu crucifié qui fonde la
liberté de la personne. Qu'ils combattent dans le monde
à côté de ceux qui cherchent le sens du monde. Qu'ils
deviennent les garants de la foi des autres, les garants
aussi de ceux qui n'ont pas la foi mais créent, parfois
très humblement, de la beauté et de la bonté. Qu'ils
soient les gardiens de l'homme ouvert, dans une culture
ouverte. Tout en affirmant paisiblement, et parce qu'ils
affirment que le Christ est vainqueur pour tous de la
mort et de l'enfer, que tout homme porte en lui l'humanité
et qu'il est, par là même, unique. La vraie question
qui est ici posée à la conscience de l'Eglise c'est
comment avancer alors qu'elle est elle-même en présence
de deux tentations qui sans cesse la guettent : celle
d'un traditionalisme clos, paralysé par la peur, qui
voudrait faire d'elle un refuge hors de l'histoire.
Et celle d'une adaptation qui transformerait le christianisme
en une variété sentimentale de l'humanitarisme contemporain.
Par rapport aux problèmes que soulève pour nous le cinéma
et qui peuvent aller jusqu'à la mort du sens, jusqu'à
«l'ère du vide», jusqu'au cynisme dû à l'acceptation
du nihilisme et du retour plus que discutable d'une
religion infra personnelle (réincarnation, drogues et
sectes ... ), ne serions-nous pas nous aussi tentés
d'oublier tout le positif de l'homme et aussi de la
société contemporaine avec ses préoccupations, même
fort ambiguës, d'Etat de droit, de liberté, de bonheur,
de santé, de respect des minorités ? L'art, nous le
savons bien, explore quant à lui les limites de la condition
humaine. Il met au jour l'angoisse, la folie, l'appel
de profundis mais aussi, de plus en plus, une poétique
du sensible, demain peut-être du visage. Une nouvelle
scientificité apparaît. La singularité, l'originalité,
le problème humain s'y réintroduisent. Dans cette approche
de l'homme, il y a ce me semble, place pour le chrétien
d'élaborer une pensée évangélique authentique, compréhensible
pour l'homme moderne, qui naisse de la foi, de l'ascèse
non pas comme restriction mais comme «œil de feu», «demeure
de lumière», «feu ineffable et prodigieux caché dans
l'essence des choses comme ce fut le cas dans le Buisson
ardent» ( in Maxime le Confesseur, Ambigua, PG 91, 1148C)
; une pensée nouvelle qui naisse de même de la contemplation,
qui exige l'union de l'intelligence et du cœur, I'éveil
du cœur profond, du cœur intelligent ou l'homme tout
entier se rassemble et se dépasse pour s'offrir à la
révélation de l'Esprit ? Une pensée capable de récapituler
tout l'humain et tout le cosmique, capable de déceler
les racines spirituelles des êtres et des choses. Et
pourquoi alors, le chrétien ne ferait-il pas du cinéma,
un instrument qui soit à même de promouvoir cette «liturgie
après la liturgie» laquelle nous donnerait peu à peu
la possibilité de «faire eucharistie en toutes choses»
comme le demande saint Paul ? Pour tout résumer, le
cinéma est une immense nostalgie, comme cette société
dont il reflète et intensifie les tendances. Déjà Baudelaire
(dans Fusées) écrivait : le Beau «comporte une idée
de mélancolie, de lassitude, même de satiété - soit
une idée contraire, c'est-à-dire une ardeur, un désir
de vivre, associé avec une amertume refluente, comme
venant de privation ou de désespérance...». D'où l'importance
d'un film comme celui de Tarkovski intitulé justement
«Nostalghia» (1983). Selon l'auteur lui-même, «le voyage
qu'un intellectuel russe effectue en Italie devient
l'occasion d'une réflexion à la recherche de quelque
chose qui peut-être n'existe pas» ou plutôt, car pour
Tarkovski ce «quelque chose» existe, la recherche et
le pressentiment, d'un absolu inaccessible ... Le cinéma
contemporain creuse notre appétit d'être mais ne sait
pas vers quoi. D'où la nostalgie, l'appel de profundis,
ce mélange d'une infinie tristesse du vide et du pressentiment
d'autre chose. Alors quoi : négatif de Dieu ?
3.
POUR UNE PRESENCE CHRETIENNE
Toute
une pédagogie est indispensable ici pour qu'une présence
chrétienne puisse jouer vis-à-vis du cinéma un rôle
aussi bien critique que prophétique. D'une part apprendre
aux jeunes (ils commencent à le faire d' eux-mêmes)
à sortir de la passivité somnambulique, à prendre leurs
distances, pour disséquer, analyser le langage cinématographique,
à la fois s'en libérer et se l'approprier. D'autre part
mettre une caméra entre les mains des jeunes qui le
souhaitent (et beaucoup le souhaitent), aussi naturellement
qu'on met entre leurs mains un stylo, des cahiers, des
livres ou un ordinateur. Voilà qui serait une véritable
réforme de l'enseignement ! Seulement ainsi les jeunes
(et les moins jeunes ne seraient plus objets passifs
et un spectacle, mais sujet créateur : en liant la création
d'images au développement, justement, d'une imagination
créatrice, d'un sens poétique juste (cf. le succès d'un
film comme «Le Cercle des poètes disparus»). Non plus
déréaliser les êtres et les choses mais les surréaliser.
Avant d'aller plus loin dans mon propos, qu'il me soit
permis ici d'en expliciter le pourquoi. Notre modernité
aujourd'hui, tragique par certains côtés est née, ce
me semble, d'une double opposition : celle des «droits»
de Dieu contre l'homme et celle des «droits» de l'homme
contre Dieu. Sans doute parce que devenu en Occident
individualiste, piétiste et moralisateur, le christianisme
du XIXème siècle n'a pu donner sens à la vie, à la créativité,
non plus qu'à la science et à la technique alors que
pour sa part l'Orient chrétien, même s'il a pu préserver
entre-temps certains germes de cette transfiguration
dans l'ascèse de ses moines, la beauté de ses liturgies,
ce fut et c'est souvent encore, à l'écart de la culture
et de l'histoire . Alors le Moyen-Age finissant, surtout
obsédé de danses macabres, quadrillé par le système
inquisitorial, a construit un Dieu terroriste, de telle
sorte que la pensée théologique, reprenant inconsciemment
les schémas archaïques, a proclamé le meurtre du Fils
pour satisfaire la justice du Père ( d'où le dolorisme
autour du Mystère de la Croix ). Rappelons ici brièvement
que dans les sociétés archaïques l'homme est immergé
dans une sorte de «sphère magique» où tout communique
et se fond : l'humanité, les dieux, le cosmos tandis
que dans la révélation judéo-chrétienne l'on a brisé
définitivement la «sphère magique» et dénoncé la mise
à mort du juste ; autrement dit, ce qu'Antigone et Socrate
avaient annoncé, Jésus et les martyrs l'accomplissent.
La Réforme quant à elle, s'est embourbée dans la double
prédestination : tous sont condamnés, Dieu en sauve
quelques-uns par pure grâce. L'Orthodoxie enfin s'est
partiellement paganisée dans le nationalisme. Mille
ans de guerres de religion, un siècle de répression
sexuelle et sociale, ont achevé de transformer le Dieu
vivant et vivifiant en Dieu-gendarme, père sadique et
castrateur. Et l'homme s'est dressé contre Dieu, contre
ces caricatures de Dieu. Mais cet élan, déraciné de
la divino-humanité (que peut signifier de nos jours
pour beaucoup le mystère de Noël) a fini par se contredire
lui-même, et l'on peut jalonner le chemin qui va «de
la mort de Dieu» à celle de l'homme. «Titanismes scientistes,
(écrit Olivier Clément dans son livre «Les Visionnaires»)
socialisme prétendant fonder la justice sur le seul
devenir de la matière, l'homme et ses droits se sont
dissous dans des explications réductrices selon la race,
la classe, la volonté de puissance ou la libido. Et
ceux qui détenaient ces explications totales se sont
arrogés un pouvoir illimité sur les autres : au meurtre
du fils par le Père s'est opposé le meurtre du père
par le fils...» Ainsi est advenu le temps du nihilisme.
Nihilisme «chaud» d'abord : chez Nietzsche l'exaltation
de la vie, du jeu créateur ; chez Marx, l'annonciation
scientifiquement garantie d'une société parfaite où
les hommes, transparents les uns aux autres, parviendraient
à une génialité polyvalente mais la réalité a montré
que cette exaltation n'était que boursouflure du néant.
Alors est venu le nihilisme «froid» de notre société,
sorte de boulimie des angoissés : avec Hiroshima la
mort individuelle est devenue planétaire ; elle n'a
jamais été aussi nue ; avec la machine l'homme a définitivement
accouché du ventre de la terre-mère mais il a oublié
l'immortalité, la résurrection, la participation à la
vie divine, et le voici maintenant orphelin au bord
de l'abîme, se sachant à la fois unique et dérisoire,
dans une civilisation qui bien souvent ne propose pour
horizon que le néant. Pour les chrétiens, de nos jours
minoritaires aussi bien à l'échelle mondiale que dans
les pays qui furent terres de chrétienté, cette situation
nouvelle est bien difficile à assumer. Ce n'est certainement
pas en tentant de sauvegarder par la force des «valeurs»
de chrétienté ni en se retirant, comme c'est le cas
de certains traditionalistes, dans des ghettos qui maudissent
la société qu'ils pourront prétendre s'enraciner dans
le spirituel, au-delà de l'histoire, et témoigner en
même temps d'une spiritualité prophétique et créatrice
capable d'éclairer l'histoire. Or l'homme d'aujourd'hui
pressent le mystère, mais très certainement autrement
: peut-être dans le froid de la solitude, peut-être
dans une tendresse désespérée qui fait que dans son
regard, et je pense surtout ici à l'oeuvre globale d'un
Angelopoulos, il y a de l'amour et du chagrin. C'est
donc le moment de manifester plus que jamais un intérêt
passionné non seulement pour la destinée globale du
monde chrétien mais pour tout humanisme qui se veut
ouvert, car cette ouverture, pour un chrétien, désignera
toujours la transcendance et constituera la possibilité
d'instituer un authentique dialogue où il serait possible
de suggérer une divino-humanité en vue d'élaborer ensemble
une «vraie dialectique» au sein de laquelle pourraient
interférer toutes les dimensions de l'humain, sans autre
unité possible que celle - indicible justement - de
la personne en sa liberté. Dans cette perspective, pourquoi
le cinéma serait-il absent d'un tel débat alors que
par vocation il est un outil de première qualité, capable
de développer une célébration d'une beauté lumineuse
et pacifiante, qui amorcerait une sorte de processus
«anticancéreux» en donnant un sens à un libre accès
à toute gratuité spirituelle qui, en fin de compte,
n'est que le libre accès à Dieu ? Il importe par conséquent
de briser le somnambulisme en approfondissant à la fois
l'angoisse et l'émerveillement, la nostalgie et une
beauté non de perversion mais de communion (la Beauté
qui «suscite toute communion» dit Denys l'Aréopagite)
au sein de laquelle le cosmos entier deviendra dialogue
entre l'homme et Dieu, les choses étant des paroles
muettes qui trouvent sens dans l'incarnation de la parole.
«Aimez toute la création de Dieu, enseigne Zossima ;
tout l'ensemble et aussi la moindre poussière ... Si
vous aimez chaque chose, vous comprendrez le mystère
de Dieu dans les choses». Dans son «Discours de Stockholm»,
Soljénitsyne a souligné que le monde moderne a brisé,
dans l'arbre de l'être, les deux branches du vrai et
du bien. Seule subsiste la branche du beau et c'est
à elle qu'il appartient d'assumer toute la sève du tronc
. Et d'abord celle de la bonté, comme dans le film que
Wajda consacre à Janus Korczak ... Toutefois nous ne
pouvons nous contenter de la seule exigence d'une présence
critique et prophétique. Nous sommes dans un monde qui
se dit «post-chrétien», alors qu'il est seulement de
«post-chrétienté». Mais dont les artistes, quoi qu'il
en soit, se sentent assez libres du christianisme pour
l'utiliser comme un merveilleux réservoir d'images au
travers d'une multitude de recherches individuelles,
entre liberté et subjectivité. Images donc assurées
de succès, d'abord parce qu'il y a des chrétiens, ensuite
parce qu'elles subsistent dans notre mémoire collective,
enfin parce qu'elles répondent à la soif obscure qui
s'exprime dans la grande «nostalgie» cinématographique.
D'où le succès, par exemple, du film d'Alain Cavalier
sur «Thérèse de Lisieux», film qui pourtant prend nettement
ses distances par rapport au christianisme et conforte
plus ou moins la légende de la «névrose chrétienne»
! Dans une société où tout s'échange, se monnaie, se
banalise, rien finalement n'a d'importance : l'indifférence
et la dérision sont l'écume de notre civilisation. Alors
d'où partir, sinon de l'homme lui-même, de la personne
irréductible ? La société sécularisée se tait sur Dieu.
Peut-être est-ce tout simplement une étrange pudeur,
une sorte d'oubli. L'attitude du chrétien par rapport
au cinéma, alors que nous savons bien combien grande
est la crise du langage dans notre société, pourrait
être (pourquoi pas), une incitation à «approfondir les
hommes dans l'existence» par une authentique culture.
Je dirais tout simplement les éveiller. Dans cette perspective,
le cinéma peut devenir pour les chrétiens un précieux
allié pour affronter les grands problèmes qu'ils ne
pourront éviter à l'aube du troisième millénaire : celui
d'une vraie connaissance, notamment d'une cosmologie,
celui du corps et de la terre, enfin la rencontre des
religions non chrétiennes en empruntant ces mêmes chemins
que certains aménagent déjà, à savoir : le chemin du
cœur conscient, du cœur-esprit, et donc du corps ressuscitant
au creuset de ce «cœur de feu», à travers une célébration
de grave beauté le chemin d'une relation «eucharistique»
avec le cosmos, la connaissance contemplative, verticale
symbolique des choses venant éclairer et orienter la
connaissance purement rationnelle ; le chemin de l'intégration
en Christ, par l'Esprit Saint, de l'intériorité et de
la transcendance, du Soi et de l'Autre, c'est-à-dire,
pour citer encore Olivier Clément, «des deux hémisphères
spirituels de l'humanité qu'on pourrait nommer métaphoriquement
l'hémisphère hindou et l'hémisphère sémitique» et dont
d'une certaine manière, le rassemblement d'Assise a
déjà ouvert la voie. Mais pour quel avenir direz-vous
? Nous ne le savons pas, tout en rêvant d'une modernité
humblement et radieusement éclairée par l'Eglise, d'une
modernité autrement dit exorcisée et transfigurée capable
d'unir la quête de l'infini par l'homme et la quête
de l'homme par l'infini et ce malgré les forces de destruction
qui continuent à se déchaîner, malgré «le désert moral
et spirituel qui croît malgré la mer qui meurt, malgré
le ciel qui se déchire. La crise actuelle, on peut la
définir comme une descente dans la mort et l'enfer.
Pour le chrétien, c'est là justement que le Christ triomphe.
Il peut se tourner vers le cinéma pour témoigner qu'on
est chrétien pour être avant tout vivant. Et ce d'autant
plus que la figure et la destinée de Jésus n'ont cessé
de hanter le cinéma, et c'est essentiellement un Jésus
crucifié, depuis «Métropolis», de Lany, en 1917, où
l'ouvrier, broyé par la machine qu'il actionne «ressemble
au Christ croulant sous le poids de la Croix». Il est
frappant que les films sur Jésus qui se veulent directement,
ouvertement chrétiens, comme celui de Zeffirelli, sont
d'un académisme sulpicien extrêmement affligeant. Combien
plus intéressant «l'Evangile selon Matthieu» (1964)
de Pasolini, ce poète maudit qui identifie sa souffrance,
«je suis, dit-il, comme un serpent réduit en bouillie
de sang» - à celle du Christ et débouche, lui le débauché
homosexuel, sur une authentique vision «épico-religieuse»
du monde. Quant au film de Scorsese à partir d'un puissant
roman de Kazantzakis («La Dernière Tentation du Christ»),
c'est une interrogation maladroite et passionnée que
les chrétiens auraient du entendre au lieu de crier
au blasphème : comme l'a dit un théologien orthodoxe
contemporain, nous avons besoin de chrétiens créateurs
et non de chrétiens pleurnicheurs ! Evangéliser et renouveler
l'imaginaire chrétien ne peut se faire, ou doit se faire
surtout, me semble-t-il, par une voie que j'appellerais
dostoïevskienne (on pourrait invoquer aussi Léon Bloy
qui parlait «de la pédagogie tragique de l'abîme») :
transformer, pour reprendre des expressions pauliniennes,
la «tristesse pour la mort» en «tristesse pour Dieu»,
le silence devant le destin en cri de Job, faire jaillir
la lumière de la résurrection au cœur même de la liberté
de l'homme, dans la grandeur et la folie de l'homme,
dans son expérience du paradis et de l'enfer. Ce n'est
pas pour rien que Bresson a adapté deux nouvelles de
Dostoïevski ( «Une femme douce», (1969), «Quatre nuits
d'un rêveur»(1971) et que dans «L'Argent», inspiré d'une
nouvelle de Tolstoï, mais profondément dostoïevskien
aussi, il étudie le cheminement de la grâce chez un
criminel racheté par l'horreur même de son geste. Et
l'on pourrait dire la même chose des derniers films
de Zanussi, ce cinéaste polonais épris de la plus excessive
spiritualité russe («Impératif» (1982) et «Le Pouvoir
du mal» (1985) ...). Suggérer donc la double et une
«christique-résurrection» du Dieu enseveli dans l'homme
athée, de l'homme enseveli dans la mort de Dieu ! Ne
pas craindre de même la liberté mais aller jusqu'au
bout de liberté celle qui butte sur l'ultime esclavage,
celui de la mort. La seule vraie transgression est alors
la résurrection. Oser enfin dire : il ne s'agit pas
dans l'espace cinématographique de prêcher mais avant
tout de tout éclairer par une certaine lumière. «Ne
cours pas après la poésie, a dit Bresson, elle pénètre
toute seule par les jointures».
4.
LE RAYONNEMENT DE L'ICONE !
La
libération de l'Europe de l'Est, le fait que la spiritualité
orthodoxe puisse redevenir là-bas l'humus d'une renaissance
culturelle même si pour le moment cela ne paraît pas
encore de façon convaincante, marqueront sans doute
profondément la création cinématographique des prochaines
années (en Russie, le cinéma est, avec la poésie, à
l'avant-garde de ce renouveau ). L'Eglise Orthodoxe,
et je le dis sans prétention ni triomphalisme, est probablement,
de toutes les Eglises chrétiennes, celle qui a su le
mieux associer le son et l'image, le déroulement liturgique
et l'icône. Elle est aussi celle qui met le plus fortement
l'accent : d'une part sur le Dieu crucifié, sur le Dieu
qui souffre humainement toutes nos agonies et tout notre
désespoir («la Kénose») ; d'autre part sur le Christ
à la fois crucifié et ressuscité. C'est précisément
sur ce point là, en matière cinématographique que pourrait
se faire la transmutation de la nostalgie en célébration.
Pour cette raison on ne pourra représenter authentiquement
au cinéma le visage du Christ qu'en tenant enfin le
plus grand compte de l'icône. Non que l'art de l'icône
ait à s'engager dans le cinéma. Mais, s'il n'est pas
figé, c'est un art qui rayonne : comme la neige où se
condense le céleste et qui, par sa douce fusion, nourrit
ruisseaux et rivières, alimente les prés, la vigne et
le blé ; qui peuvent alors s'offrir en eucharistie.
Il y a d'abord le «monde qui nous entoure». Que voyons-nous
? Un monde sans dessus-dessous, un gâchis apparent,
un désespoir tragique et des souffrances qui ne servent
apparemment à rien . Est-ce tout ? Bien sûr que non.
Il y a le «problème du mal», oui, mais il y a aussi
le «problème du bien». Regardons autour de nous, et
nous verrons non seulement la confusion, mais la beauté.
Dans le flocon de neige, dans la feuille, dans l'insecte
- souvenons-nous ici de l'admirable film «Microcosmos»
- nous découvrons des modèles d'une structure si délicate,
d'une harmonie telle que le talent humain n'y saurait
prétendre. Sans vouloir tomber dans le sentimentalisme,
nous ne pouvons tout de même pas les ignorer. Cette
coexistence dans le monde de sens et de confusion, de
cohérence, de beauté mais aussi de futilité, fournit
le premier de ces signes qui jalonnent notre marche
vers Dieu. Ce signe nous le trouvons aussi en «nous-mêmes».
Pourquoi, en dehors de ma recherche du plaisir et de
mon aversion pour la souffrance, est-ce que j'éprouve
un sentiment de devoir et d'obligation morale, le sens
de ce qui est bien ou de ce qui est mal ? Pourquoi ai-je
une conscience ? Cette conscience ne me dit pas simplement
d'obéir à des règles qui m'ont été enseignées par d'autres,
elle est personnelle. Et qui plus est, pourquoi est-ce
que moi, qui suis placé dans le temps et dans l'espace,
est-ce que je ressens ce que Nicolas Cabasilas appelle
«la soif infinie» ou «la soif de l'infini» Qui suis-je
? Que suis-je ? La réponse à ces questions est loin
d'être évidente. L'être humain est incommensurable.
Nous ne connaissons qu'à peine notre être véritable,
notre moi profond. Grâce à notre faculté de perception,
extérieure et intérieure, grâce à notre mémoire, grâce
au pouvoir de notre inconscient, nous nous jouons de
l'espace, nous nous étirons vers les confins du passé
ou du futur pour atteindre l'au-delà de l'espace et
du temps, l'éternité. «En notre cœur, il y a des profondeurs
insondables» affirment les homélies de saint Macaire,
«ce n'est qu'un petit vaisseau ; pourtant on y voit
des dragons, des lions, des créatures à venin et les
trésors du mal. On y voit des sentiers escarpés, raboteux
et des gouffres béants. Dieu y est aussi. Il y a les
anges, il y a la vie et le Royaume, il y a la lumière,
les apôtres, les cités célestes et les trésors de la
Grâce : toute chose y est présente». Ainsi chacun de
nous porte en son cœur un second «signe». Pourquoi ai-je
une conscience ? Comment expliquer mon sens de l'infini
? Oui, il y a en moi quelque chose qui me force toujours
à regarder au-delà de mes limites ; oui, il y a en moi
une source d'émerveillement, une source de transcendance
constante de mon moi. Il y a encore un troisième signe
: ma relation avec les autres êtres humains. Nous avons
tous connu, ne serait-ce qu'une ou deux fois au cours
de notre vie, ces instants de découverte où soudain,
nous avons vu s'ouvrir l'autre, dans toute sa profondeur,
dans toute sa vérité. Nous avons alors fait l'expérience
de sa vie intérieure comme si elle était devenue nôtre.
Cette rencontre avec l'autre tel qu'il est en vérité
est, elle aussi, un contact avec la transcendance, avec
l'intemporel. Une rencontre avec une réalité plus forte
que la mort. Dire à un autre, de tout notre cœur : «Je
t'aime», c'est lui dire : «Tu ne mourras jamais». En
ces moments d'échange personnel nous réalisons, non
par des arguments, mais par conviction qu'il y a une
vie après la mort. Ainsi, dans nos relations avec les
autres, comme dans notre propre expérience, nous connaissons
des moments de transcendance, orientés vers quelque
chose qui nous attend, au-delà. Comment pouvons-nous
être fidèles à ces moments ? Comment pouvons-nous les
comprendre ? Les cinéastes des pays orthodoxes ont eu,
et ont, les yeux (et le cœur) nécessairement purifiés,
agrandis par l'icône. Par l'icône en effet, ils peuvent
voir le monde dans l'Eglise à travers «l'œil du cœur»,
puisque tel est le but poursuivi par celle-ci, tandis
que de son côté l'objectif de la caméra du cinéaste,
cet «œil charnel» oserais-je dire, est quant à lui capable
de voir l'Eglise dans le monde. Pourquoi alors ne pas
imaginer que le cinéma, puisqu'il est à même de pouvoir
«saisir à sa façon le cœur de l'Eglise», ne serait pas
dans l'autre sens un précieux auxiliaire pour nous aider
à situer le lieu où l'on peut mieux connaître ses limites
? Où l'on retrouverait le cosmos comme Parole et Don
de Dieu ? Où le monde ne risquerait plus d'être idole
mais deviendrait langage et temple ? Où l'homme de notre
temps ne connaîtrait plus uniquement la faim du corps
ou uniquement la nourriture de l'esprit parce que tout
simplement le pain deviendrait enfin pour lui véritable
mystère et véritable joie puisque, nous dit Jean dans
le prologue de son Evangile, le «Verbe s'est fait chair»
? Et qui peut mieux que lui aujourd'hui traduire l'éros
en un véritable langage qui exprimerait la poétique
d'une vraie rencontre entre deux personnes, une sorte
de «Liturgie des corps» qui manifesterait l'accomplissement
de l'image de Dieu en chaque être ? André Tarkovski
par exemple, l'un des plus grands sans doute parmi les
cinéastes orthodoxes, disait que la création doit être
«une épiphanie» que le film peut constituer «pour l'auteur
et le spectateur un acte spirituel purificateur», et
il aimait reprendre le mot de Dostoïevski : «la beauté
sauvera le monde» une beauté de transfiguration passée
par la défiguration de la Croix ; une beauté de mort
et de résurrection !
Nice,
le 4 mars 1999
BIBLIOGRAPHIE
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Ed. Paulines, Montréal 1992 pp: 123-131
-
O. CLEMENT :
"ANACHRONIQUES"
Ed. DDB Paris 1990, pp:228-235
"LES
VISIONNAIRES" Ed. DDB Paris 1986 pp:83-103 ; 247-263
"L'OEIL
DE FEU" Ed; Hermes, Fata Morgana 1994 pp:99-101
-
KALLISTOS WARE : "Approches de Dieu dans la
Tradition Orthodoxe" Ed. DDB Coll. Théophanie
Paris 1982 pp:23-43
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