L'icône
de l'Epiphanie représente symboliquement le
baptême du Christ au Jourdain, et illustre également
certains textes scripturaires concernant le rôle
de l'eau comme instrument et de la création
du monde, et du salut de l'humanité.
En la personne de Jésus-Christ, qui n'a pas
connu le péché, le baptême n'est
évidemment pas octroyé, comme dans notre
cas " pour la repentance ", " en vue
de la rémission des péchés"
(Actes 2/38).
Traversant la croûte terrestre, le Christ pénètre
dans un "tombeau liquide", ce trou noir,
lieu du "schéol" ou séjour
des morts. Son baptême est essentiellement un
passage dans la mort et la résurrection, comme
le sera, à sa suite, notre propre baptême,
ainsi que l'explique saint Paul : "Nous avons
donc été ensevelis avec lui dans la
mort par le baptême, afin que, comme Christ
est ressuscité d'entre les morts par la gloire
du Père, de même nous aussi nous marchions
en nouveauté de vie " (Rom. 6/4). De plus,
l'entrée du Christ dans le Jourdain a déclenché
une véritable Pentecôte personnelle,
la première manifestation du Dieu trinitaire.
"Dans ton baptême au Jourdain, Seigneur,
s'est manifestée l'adoration de la Trinité...
"
On peut faire, de l'icône, d'abord une lecture
verticale : la déchirure du ciel, toujours
en arc de cercle, annonce le mouvement théophanique,
la présence du Père qui désigne
le Fils ("Celui-ci est mon Fils bien-aimé
en qui j'ai mis toute mon affection", Mat. 3/18),
et laisse filtrer le triple rayon, avec la colombe
à mi-course, porteuse de l'amour du Père
envers le Fils, comme de l'amour du Fils envers le
Père. La colombe nous reporte au début
de la Genèse, où l'Esprit se mouvait
sur les eaux à l'aube de la création,
tout comme ici, elle descend à l'aube de la
création d'une humanité nouvelle.
Le baptême a des répercussions cosmiques
: " Le Christ est baptisé ; il sort de
l'eau, et avec lui il relève le monde "
(hymne liturgique). Ce jour-là, se fait dans
l'Eglise la grande bénédiction des eaux
: mer, rivières, lacs, sans parler de l'eau
que les fidèles emporteront chez eux pour la
consommer à des occasions particulières.
Une lecture horizontale de l'icône est également
possible. Elle part de la tête de saint Jean,
qui résume à lui seul la présence
de l'humanité. Le " dernier des prophètes
" dut se faire violence (Mat. 3/14) pour accepter
de baptiser celui dont il n'était pas digne
de délier la courroie des souliers. A droite,
le monde céleste et angélique, les trois
anges aux mains voilées en signe d'adoration.
Au milieu, enfin, le Christ, qui, d'un geste, bénit
l'univers aquatique, au point de croisement, sur un
plan horizontal, des mondes humain et angélique,
et, vertical, du ciel, de la terre et de l'enfer.
Tous les éléments de la création
sont ainsi rassemblés, réunis, en vue
de l'uvre du salut.
D'après
" Lumière d'Orient " Michel Evdokimov,
Ed. Droguet et Ardant, Paris 1981
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