EGLISE ORTHODOXE D'ESTONIE

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Orthodoxie

 
 
 
 

SCHEMA DE L'ICONE DE L'ANNONCIATION

 

« Aujourd'hui commence à poindre l'aurore de notre salut, et se manifeste le mystère éternel. Car le Fils de Dieu devient Fils de la Vierge, et Gabriel annonce cette grâce. Avec l'Ange, disons donc à la Mère de Dieu : Réjouis-toi, pleine de grâces, le Seigneur est avec toi. » (Tropaire de l'Annonciation).

Ce refrain donne les éléments principaux du mystère de l'Annonciation, qu'on trouve de même dans l'icône, c'est à dire : les cieux ouverts en haut au milieu de l'icône, l'Archange Gabriel descendu des cieux à la droite, (agissant), et la Mère de Dieu, en général sur un piédestal, à la gauche, (recevant).

On peut distinguer deux types d'icônes de l'Annonciation : le type simple qui se limite à ces trois éléments, et le type élaboré qui ajoute des bâtiments et d'autres accessoires.

Les représentations simples. La plus simple se trouve dans les catacombes romaines de Priscille et de Saint Calixte. L'ange est représenté sans ailes et sans auréole. Mais dès le 6è siècle, sur les ampoules de Monza, Gabriel est ailé. Lui et la Mère de Dieu sont auréolés. Elle tient un fuseau pour filer, de sa main droite. ( Il en est de même dans un diptyque d'ivoire du 10è siècle réalisé à Constantinople et aujourd'hui conservé au Musée de l'Ermitage à Saint Petersbourg. Dans un autre ivoire byzantin du 10è siècle, conservé à la collection Basilewsky à Paris, la main droite de la Vierge est vide. Elle est toujours debout, mais un siège est figuré derrière elle. Dans des icônes plus récentes, la Vierge est parfois représentée debout allant chercher de l'eau au puits qui occupe le centre de l'icône).
On voit que la Mère de Dieu se tient debout, la tête inclinée vers son cœur et vers la droite, et porte aussi cette quenouille de fil pourpre qu'elle était en train de tisser à l'arrivée de l'Archange, selon la tradition.
L'Archange Gabriel s'avance avec force de la droite (notre gauche) vers la Mère de Dieu. Il semble à peine toucher terre. Ses pieds nus sont chaussés de sandales légères.
Il bénit Marie de la main droite, (le pouce touchant l'annulaire), et tient de la main gauche un bâton de pèlerin, signe qu'il est un messager.
Parmi les représentations élaborées, citons la célèbre icône de l'Annonciation de Saint Clément d'Ohrid, en Serbie, du 14è siècle, celle attribuée à Saint André Roublev, de 1405, placée sur l'iconostase de la Cathédrale de Moscou, et celle du Monastère de Stavronikita au Mont Athos, du 16è siècle... Dans ces icônes, on a ajouté aux trois éléments principaux le siège de bois sur lequel la Vierge est assise, recouvert de deux coussins (parfois, il n'y en a qu'un), et au fond, deux bâtiments, réunis par un mur. Dans une variante, la Mère de Dieu tient dans sa main gauche un rouleau, montrant qu'elle accomplit la loi. Dans une autre variante, un petit aqueduc, série de petites voûtes, est figuré en bas de l'icône. Cela peut évoquer la grâce qui visite même les régions inférieures - notons que la ville de Constantinople est construite sur un immense réseau souterrain voûté de réserves d'eau.
L'évangile de Saint Luc (Luc 1 : 29-39) nous décrit les trois phases du dialogue ente la Mère de Dieu et l'Ange. Nous verrons que, si l'attitude de l'Ange exprime la constance, celle de la Mère de Dieu peut manifester trois dispositions d'esprit. A l'inverse d'Eve, la Vierge se réserva d'accepter ou non les paroles de l'Ange. C'est pourquoi ses oreilles sont à demi-cachées par son sous-voile.
Au moment où l'Ange la salua par « Réjouis toi, pleine de grâce le Seigneur est avec toi », elle fut très troublée. L'Ange la rassura : « Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. Voici que tu concevras dans ton sein et enfanteras un Fils, et tu l'appelleras du nom de Jésus [ ... ] et son règne n'aura pas de fin. » Dans l'icône, cette phase se traduit par la tête légèrement inclinée de la Vierge, exprimant la réflexion ; les plis de ses vêtements sont moins gonflés que ceux de l'Ange.
Dans la deuxième partie du dialogue maintenant amorcé, la Vierge demanda : «Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais pas d'homme?» L'Ange répondit : « L'Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du très Haut te couvrira de son ombre ... » (Luc 1 : 34-35) L'Annonciation est en effet la première des douze icônes des fêtes de l'Eglise où l'Esprit Saint est suggéré par un voile rouge drapé en haut de l'icône, entre les toits des deux petits bâtiments. Cette deuxième phase se marque par la sobriété des plis et des couleurs des vêtements de la Vierge. Traditionnellement, elle porte une robe bleu foncé et un manteau rouge foncé. Par contraste, l'archange est vêtu de couleurs claires : un manteau en général bleu gris clair et une robe dans les gris rose clairs, car il est messager de lumière.
Dans la troisième phase du dialogue, Marie dit alors : « Je suis la servante du Seigneur. Qu'il m'advienne selon ta parole. » Cette acceptation est rendue par un tracé iconographique du buste de la Mère de Dieu tendu vers le haut, témoignant qu'elle est l'échelle sainte par laquelle Dieu va descendre sur terre. On pourrait aussi voir un effet de cette acceptation dans l'harmonie générale de toute l'icône et le fait qu'elle brille de la lumière incréée, divine.
Notons que ces trois phases correspondent à trois types de prière, et aussi aux trois tentations du Christ au désert. C'est pourquoi on peut dire que la main droite levée de la Mère de Dieu, paume vers nous, doigts orientés vers le coin en haut et à la droite de l'icône exprime à la fois 1) la retenue, 2) la sobriété (intentions), 3) le remerciement à Dieu.
Une des appellations grecques de la Fête, "kairétismi", rappelle le salut de l'ange, repris par l'Eglise lors des cérémonies de carême du même nom, et de l'hymne Acathiste.
Notre appellation d'Annonciation, en latin ad-nuntius, Annonciade en vieux français, l'arrivée du messager, est tirée du mot grec "évanguélizo"qui signifie annoncer. L'Eglise a utilisé "évanguélion"pour signifier les Evangiles, l'Ecriture Sainte de tout ce que le Christ a dit et fait ; le français a choisi de le transcrire par Evangile, plutôt que par Bonne Nouvelle, dès le temps de Saint Irénée de Lyon au 2è siècle («Even gilaion», qui signifie en hébreu la pierre roulée, a la même sonorité que "évanguélion". «Gilaion» est le substantif absolu du Hiphil du verbe GALHA, ce qui veut dire qu'on a fait et qu'on fait toujours rouler, Les premiers chrétiens associaient sans doute ces mots au matin de la Résurrection. Pour la fête du 25 mars, l'Eglise a forgé le mot "Evanguélismos", si "O Evanguélismos tis Théotokou", a été traduit littéralement en russe par «la Bonne Nouvelle à la Mère de Dieu», n'est-ce pas parce que la fête de l'Annonciation contient déjà en germe tout le message évangélique ? Une icône conservée à la Galerie Tetriakov à Moscou, de la fin du 12è s. ou du début du 13è s., introduit une nouveauté, qui restera sans suite, tentant de représenter le cœur du mystère : l'enfant Jésus nouveau-né est représenté au niveau de la poitrine de sa mère.

Elisabeth Hériard in Revue "Orthodoxes à Marseille"

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