Se
confesser
Nous devons sans cesse apprendre à nous repentir.
Il est indispensable de tendre une sorte de fil d'une
confession à l'autre, afin que les intervalles
entre les périodes de retraite soient comblés
par le combat spirituel et par des efforts que nourrissent
les impressions de la retraite précédente
et que provoque l'attente d'une nouvelle confession
imminente.
Il arrive, c'est vrai, qu'après une confession
réussie auprès d'un prêtre, les
confessions suivantes, entendues par le même prêtre,
apparaissent quelque peu molles et produisent une faible
impression ; c'est alors que l'on envisage de changer
de confesseur.
Mais cette raison ne suffit pas à justifier une
démarche si importante ; outre que nos propres
sensations en confession ne sauraient toucher l'essence
du sacrement, un enthousiasme spirituel insuffisant
lors de la confession est souvent la marque de notre
propre misère spirituelle. A ce propos, le père
Jean de Kronstadt dit : "La contrition doit être
absolument libre et aucunement extorquée par
la personne qui confesse." Un homme qui souffre
véritablement de la plaie de son péché
ne regarde pas à qui il confesse ce péché
qui le torture ; il ne cherche qu'à le confesser
le plus tôt possible et à s'en soulager.
Autre chose si, laissant là l'essence du sacrement
de pénitence, nous allons à confesse pour
discuter. C'est ici qu'il importe de distinguer la confession
de l'entretien spirituel qui, lui, peut se dérouler
en dehors du sacrement et dont il vaut mieux le séparer,
car l'entretien, traitât-il de sujets spirituels,
peut distraire et refroidir le pénitent, l'entraîner
dans une discussion théologique et affaiblir
l'acuité de sa componction.
Comment se confesser ? La confession n'est pas un entretien
sur nos défauts et nos doutes, elle ne consiste
pas à renseigner le confesseur à notre
sujet, elle est encore moins une "coutume pieuse".
La confession est brûlant repentir du cur,
soif de purification issue de la conscience du sacré,
elle est mort au péché et renaissance
à la sainteté. La componction est déjà
un degré de sainteté ; l'insensibilité
et la mécréance consistent à se
placer hors du sacré, hors de Dieu.
Avant la confession, il est indispensable de demander
pardon à tous ceux envers qui nous sommes coupables,
afin d'aller à la confession avec une conscience
allégée.
Ce n'est pas une liste de péchés qu'il
faut apporter au confesseur, mais la componction, non
pas une dissertation élaborée dans les
moindres détails, mais un cur brisé.
..
Mais connaître ses péchés ne signifie
pas encore s'en repentir. La "contrition du cur",
le chagrin causé par nos péchés,
voilà qui importe par-dessus tout ce que nous
pouvons apporter à la confession.
Notre insensibilité en confession a le plus souvent
pour racine l'absence de crainte de Dieu et l'incroyance
cachée. C'est là que nous devons concentrer
tous nos efforts. Voilà pourquoi les larmes versées
en confession ont tant d'importance elles amollissent
notre être pétrifié, nous secouent
"du haut jusqu'en bas", elles simplifient
et procurent un bienfaisant oubli de soi, éloignent
l'obstacle principal au repentir : notre "moi".
Les orgueilleux et ceux qui sont pétris d'amour
propre ne pleurent pas. Qui a pleuré s'est adouci,
s'est soumis, a fondu. Voilà pourquoi ceux qui
ont versé ces larmes et à qui Dieu a envoyé
"les pleurs qui procurent la joie", possèdent
la mansuétude, l'absence de colère, la
douceur, la tendresse et la paix de l'âme. Il
ne faut pas avoir honte de pleurer en se confessant,
il faut laisser couler librement les larmes qui nous
lavent de nos souillures. "Donne-moi des pluies
de larmes en ce beau jour de jeûne, afin que je
pleure et lave la souillure née des plaisirs,
et que je me présente purifié devant toi".
(Hymne vespérale de la première semaine
de Carême).
Les fruits de la confession
La marque d'un repentir achevé est une sensation
de légèreté, de pureté,
de joie ineffable, au moment où le péché
apparaît tout aussi difficile et impossible que
cette joie semblait éloignée il y a à
peine un instant.
Notre repentir ne sera pas complet si, en avouant, nous
n'affirmons pas intérieurement la résolution
de ne pas retourner au péché confessé.
Mais, dira-t-on, comment est-ce possible ? Comment puis-je
promettre à mon confesseur et à moi-même
que je ne récidiverai pas ? N'est-il pas plus
exact de soutenir juste le contraire, d'avoir la certitude
que le péché se reproduira ? (Chacun sait
bien, par expérience, qu'au bout d'un certain
temps on revient inévitablement aux mêmes
péchés. A s'observer d'une année
sur l'autre, on ne remarque aucune amélioration,
"on fait un bond, et on se retrouve au même
endroit".)
Ce serait épouvantable s'il en était ainsi.
Mais, heureusement, ce n'est pas le cas. A condition
qu'il y ait eu un grand désir de se corriger,
il n'est pas d'exemple que des confessions successives
accompagnées de la Sainte Communion ne soient
parvenues à produire dans l'âme de bienfaisants
changements.